
As-tu déjà goûté au petit dernier des "fous du stade" repentis, ces gamins de Leicester qui ont pour nom KASABIAN ?
Depuis l’album éponyme en 2004, et succédant à la construction d’un Empire en 2006, Kasabian a fait un sacré bout de chemin. Son chemin épileptique vers un West Ryder Pauper Lunatic Asylum.
Avec ce nouvel opus, le groupe opère un retour aux origines, d’abord de leur patronyme, ensuite d’une certaine idée du rock US.
Et si le mot « kasabian » n’apparaît dans aucun dictionnaire de ta bibliothèque, c’est pour la simple et bonne raison qu’il fait référence à l’histoire sombre de l’Amérique des Sixties.
Petit retour en arrière, à l’époque où les serial killers faisaient trembler le Nouveau Monde. Nous sommes dans la Californie des années 60. Les communautés hippie battent leur plein, transforment les drogues sud-américaines en produits de consommation de masse, et font salle comble avec des musiques venues de l’espace…
L’une d’entre elles, « La Famille », qui a pour patriarche Charles Manson, ne manquera pas de mener cette débauche jusqu’à l’extrême. Enfant de la misère et de l’alcool, Charles voit, à cinq ans, sa mère incarcérée pour vol à main armée. A 16 ans, après plusieurs peines d’internement, il est jugé « agressivement antisocial » par les médecins.
Dans cet environnement désœuvré et voué à la mise sur le carreau, l’album blanc des Beatles devient, par le fruit du hasard, l’objet obsessionnel de Charles.
En tant que leader aux allures christiques de « La Famille » Manson, il associe des extraits de la Bible avec les textes des « Fab Four », et conçoit une prophétie selon laquelle les Noirs allaient bientôt dominer les Blancs et se tourneraient vers lui pour diriger leur nouvelle nation. Afin de précipiter cette prophétie, il demande en août 1969 à quelques-uns des membres de sa communauté de commettre des assassinats dans les beaux quartiers de Los Angeles.
Le 9 août 1969, Charles "Tex" Watson, Patricia Krenwinkel et Susan Atkins, membres de « La Famille », pénètrent dans la maison de Sharon Tate, femme de Roman Polanski, alors enceinte, et la tuent.
Pour revenir à nos « brebis égarées », l’une de ses adeptes, Linda Kasabian, participe également à l’assassinat. Restée à l’extérieur, près de la voiture, elle est surveillée par la police au moment du meurtre. En échange de son témoignage et au vu des sentiments humains qu’elle seule parvient à exprimer, Linda Kasabian obtient une immunité juridique. Et une postérité, jusqu’à aujourd’hui méconnue.
Avec un tel « état civil », le groupe n’est pas né pour faire dans la demi-mesure. Au fil des prestations studio and live se confirme leur goût prononcé pour le son rocailleux et la brutalité des red necks [expression péjorative désignant le stéréotype de l’Américain vivant en milieu campagnard].
Dignes héritiers du « Madchester » [le Manchester en crise de folie underground] des années 80, avec les Stones Roses et les Happy Mondays en fer de lance, leur leitmotiv reste plus que jamais de faire danser avec une voix criarde, comme toute droite sortie du gosier d’un pilier de saloon, des beats sourds et des guitares acides.
Quand on vous parle de « retour aux sources », ce ne sont pas des paroles prophétiques jetées en l’air ! West Ryder Pauper Lunatic Asylum démarre comme un road-movie à la sauce No Country for Old Men (pour les cinéphiles). On s’écarte juste un peu de la Route 66 pour ouvrir le champ aux instincts bestiaux les plus prolifiques de l’âme humaine. On entre dans une histoire décalée de la civilisation américaine. Une civilisation citée en exemple pour ses dérapages incontrôlés. Sur des chemins de traverse, plus poussiéreux.
Cet album nous transporte alors, depuis les canyons arides et dépouillés de Monument Valley jusqu’aux contrées boisées de l’Oregon. Avec West Ryder Silver Bullet, on croirait suivre les pas d'un "lonesome cowboy" addict, égaré dans un Farwest post-moderne. Avec Thick As Thieves, on croirait entendre la douce mélancolie du trappeur ressourcé par sa communion avec la nature. Magnifique et surprenante ballade.
Et, pour que le tableau soit complet, Kasabian dessine avec ses couleurs la Californie que nous connaissons bien, plus ou moins fantasmée, avec ses plages soleil couchant et sa jeunesse dorée. Ladies and Gentlemen, Roll the dice, morceau doucereux à souhait, nous rappelle les harmonies vocales complexes et mélodiques du groupe phare de la surf music. Les Beach Boys, rien que ça.
Entretemps, avec Vlad The Impaler, nos guides très sanguins nous auront entraînés dans les bas-fonds suintants du centre de l'Angleterre. Au détour d’une ruelle qui sent bon la bière tiède, on croit apercevoir les Beastie Boys.
Enfin, pour occuper le temps du voyage depuis la perfide Albion, Kasabian nous a fait passer par le Hindu London avec, dans les oreilles, un Where did all the love go ? aux sonorités toutes orientales. Avant de nous offrir une visite chez Pink Floyd. Les vocaux de Fast Fuse rappellent en effet la période « psyché » du groupe formé en 1954, tandis que Secret Alphabets résonne encore dans les tympans les plus avertis comme un hommage appuyé au père fondateur, Syd Barrett. La voix d’un génie instable. Un génie, quoi. Une sorte de déambulation, comme un moyen pour le groupe de chasser les mauvais démons avec sérénité.
Et rien de mieux qu'une touche de gospel pour exprimer un état d'esprit délivré du doute, pour conduire l’âme d’un groupe repenti jusqu’au bout de l’extase. Happiness !
On pense alors au dernier album de Gorillaz, Demon Days, dans lequel Damon Albarn et sa troupe n’hésitent pas, eux non plus, à faire venir un chœur pour clore la messe.
La coïncidence n’est pas vaine puisque, pour les deux groupes, un seul et même chef d’orchestre est aux manettes. Dan The Automator, producteur aux multiples facettes, est aussi celui qui a tout récemment offert une cure de jouvence au tube old school, Rapper’s Delight.
Sans peur ni reproche, le contrat de nos quatre tueurs à gages est donc rempli avec ce retour gagnant (et dépassé, enfin!) aux sources du hard rock arrogant qu'on aime tant !
Alors, bonnes pour l’asile, nos « idoles » du rock ?
Depuis l’album éponyme en 2004, et succédant à la construction d’un Empire en 2006, Kasabian a fait un sacré bout de chemin. Son chemin épileptique vers un West Ryder Pauper Lunatic Asylum.
Avec ce nouvel opus, le groupe opère un retour aux origines, d’abord de leur patronyme, ensuite d’une certaine idée du rock US.
Et si le mot « kasabian » n’apparaît dans aucun dictionnaire de ta bibliothèque, c’est pour la simple et bonne raison qu’il fait référence à l’histoire sombre de l’Amérique des Sixties.
Petit retour en arrière, à l’époque où les serial killers faisaient trembler le Nouveau Monde. Nous sommes dans la Californie des années 60. Les communautés hippie battent leur plein, transforment les drogues sud-américaines en produits de consommation de masse, et font salle comble avec des musiques venues de l’espace…
L’une d’entre elles, « La Famille », qui a pour patriarche Charles Manson, ne manquera pas de mener cette débauche jusqu’à l’extrême. Enfant de la misère et de l’alcool, Charles voit, à cinq ans, sa mère incarcérée pour vol à main armée. A 16 ans, après plusieurs peines d’internement, il est jugé « agressivement antisocial » par les médecins.
Dans cet environnement désœuvré et voué à la mise sur le carreau, l’album blanc des Beatles devient, par le fruit du hasard, l’objet obsessionnel de Charles.
En tant que leader aux allures christiques de « La Famille » Manson, il associe des extraits de la Bible avec les textes des « Fab Four », et conçoit une prophétie selon laquelle les Noirs allaient bientôt dominer les Blancs et se tourneraient vers lui pour diriger leur nouvelle nation. Afin de précipiter cette prophétie, il demande en août 1969 à quelques-uns des membres de sa communauté de commettre des assassinats dans les beaux quartiers de Los Angeles.
Le 9 août 1969, Charles "Tex" Watson, Patricia Krenwinkel et Susan Atkins, membres de « La Famille », pénètrent dans la maison de Sharon Tate, femme de Roman Polanski, alors enceinte, et la tuent.
Pour revenir à nos « brebis égarées », l’une de ses adeptes, Linda Kasabian, participe également à l’assassinat. Restée à l’extérieur, près de la voiture, elle est surveillée par la police au moment du meurtre. En échange de son témoignage et au vu des sentiments humains qu’elle seule parvient à exprimer, Linda Kasabian obtient une immunité juridique. Et une postérité, jusqu’à aujourd’hui méconnue.
Avec un tel « état civil », le groupe n’est pas né pour faire dans la demi-mesure. Au fil des prestations studio and live se confirme leur goût prononcé pour le son rocailleux et la brutalité des red necks [expression péjorative désignant le stéréotype de l’Américain vivant en milieu campagnard].
Dignes héritiers du « Madchester » [le Manchester en crise de folie underground] des années 80, avec les Stones Roses et les Happy Mondays en fer de lance, leur leitmotiv reste plus que jamais de faire danser avec une voix criarde, comme toute droite sortie du gosier d’un pilier de saloon, des beats sourds et des guitares acides.
Quand on vous parle de « retour aux sources », ce ne sont pas des paroles prophétiques jetées en l’air ! West Ryder Pauper Lunatic Asylum démarre comme un road-movie à la sauce No Country for Old Men (pour les cinéphiles). On s’écarte juste un peu de la Route 66 pour ouvrir le champ aux instincts bestiaux les plus prolifiques de l’âme humaine. On entre dans une histoire décalée de la civilisation américaine. Une civilisation citée en exemple pour ses dérapages incontrôlés. Sur des chemins de traverse, plus poussiéreux.
Cet album nous transporte alors, depuis les canyons arides et dépouillés de Monument Valley jusqu’aux contrées boisées de l’Oregon. Avec West Ryder Silver Bullet, on croirait suivre les pas d'un "lonesome cowboy" addict, égaré dans un Farwest post-moderne. Avec Thick As Thieves, on croirait entendre la douce mélancolie du trappeur ressourcé par sa communion avec la nature. Magnifique et surprenante ballade.
Et, pour que le tableau soit complet, Kasabian dessine avec ses couleurs la Californie que nous connaissons bien, plus ou moins fantasmée, avec ses plages soleil couchant et sa jeunesse dorée. Ladies and Gentlemen, Roll the dice, morceau doucereux à souhait, nous rappelle les harmonies vocales complexes et mélodiques du groupe phare de la surf music. Les Beach Boys, rien que ça.
Entretemps, avec Vlad The Impaler, nos guides très sanguins nous auront entraînés dans les bas-fonds suintants du centre de l'Angleterre. Au détour d’une ruelle qui sent bon la bière tiède, on croit apercevoir les Beastie Boys.
Enfin, pour occuper le temps du voyage depuis la perfide Albion, Kasabian nous a fait passer par le Hindu London avec, dans les oreilles, un Where did all the love go ? aux sonorités toutes orientales. Avant de nous offrir une visite chez Pink Floyd. Les vocaux de Fast Fuse rappellent en effet la période « psyché » du groupe formé en 1954, tandis que Secret Alphabets résonne encore dans les tympans les plus avertis comme un hommage appuyé au père fondateur, Syd Barrett. La voix d’un génie instable. Un génie, quoi. Une sorte de déambulation, comme un moyen pour le groupe de chasser les mauvais démons avec sérénité.
Et rien de mieux qu'une touche de gospel pour exprimer un état d'esprit délivré du doute, pour conduire l’âme d’un groupe repenti jusqu’au bout de l’extase. Happiness !
On pense alors au dernier album de Gorillaz, Demon Days, dans lequel Damon Albarn et sa troupe n’hésitent pas, eux non plus, à faire venir un chœur pour clore la messe.
La coïncidence n’est pas vaine puisque, pour les deux groupes, un seul et même chef d’orchestre est aux manettes. Dan The Automator, producteur aux multiples facettes, est aussi celui qui a tout récemment offert une cure de jouvence au tube old school, Rapper’s Delight.
Sans peur ni reproche, le contrat de nos quatre tueurs à gages est donc rempli avec ce retour gagnant (et dépassé, enfin!) aux sources du hard rock arrogant qu'on aime tant !
Alors, bonnes pour l’asile, nos « idoles » du rock ?
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